Depuis quelques jours, nous assistons à des discours émouvants, des
témoignages de solidarité et des élans d’affection aux quatre coins de
l’Hexagone. On pense (enfin !) à remercier ceux qui nous protègent, parfois au
péril de leur vie. On se rappelle qu’on a dû se battre pour défendre nos
valeurs. On fait partie d’une grande communauté d’humains qui n’ont pas
forcément les mêmes opinions, mais qui se tendent la main dans les
épreuves.
Je dois dire que je suis très impressionnée par ces belles preuves d’humanité
et de solidarité. Je suis fière de mes compatriotes, de tous ceux qui s’élèvent
contre la barbarie, pour léguer à nos enfants un monde meilleur.
A mon tour, j’aimerais rendre hommage à ceux qui œuvrent pour améliorer mon
confort de vie, et qui me font oublier les soucis de la mucoviscidose pour
quelques secondes, quelques heures, quelques jours… Tous ceux grâce à qui je
vis des moments magnifiques, de partage, de bonheur, de frissons… Tous ces
petits moments qui remplissent ma vie et en font un arc-en-ciel de rayons de
sourire. Tout ce qui fait que j’ai envie de continuer à me battre contre mon
démon intérieur. Merci à vous !
Les infirmières à l’hôpital qui gardent le sourire, même en exécutant des
tâches ingrates.
Les infirmières à domicile qui se font discrètes pour perturber le moins
possible la vie de famille.
Les médecins débordés qui prennent le temps de calmer mes angoisses en dehors
des horaires de consult’.
Les kinés qui se rendent disponibles en fonction de mon emploi du temps.
La pharmacienne qui s’arrange toujours pour livrer mes médicaments même quand
l’ordonnance est en attente de renouvellement.
Les auteurs dont je dévore les lignes dans les salles d’attente de
l’hôpital.
Ma famille, qui fait bloc autour de moi, toujours présente pour les bons et les
moins bons moments.
Les bonnes volontés qui s’engagent comme bénévoles au sein de
l’association.
Les amis qui viennent prendre de mes nouvelles et partagent de beaux moments
d’amitié.
Les artistes qui, sans le savoir, saupoudrent ma vie de petits bonheurs, au gré
de leurs chansons, leurs films, leurs spectacles… Et plus particulièrement
Patrick Bruel !
Pour tout ça, merci !
Rayons de sourire,
Jessica
Laurent – 16 mars 1998
C’était Benoît Chevallier qui m’avait présenté à ses anciens fournisseurs de peinture, Marie-Agnès et Bernard, avec qui il avait noué des relations commerciales autant que cordiales. Ils étaient maintenant devenus les gérants de l’Amphitryon, un restaurant qu’ils avaient racheté sur Colomiers. Leur restaurant était à l’image du personnage de la pièce de Molière qui les avait inspirés pour baptiser leur nouvelle entreprise : celui qui reçoit et celui qui accueille.
Benoît, qui était à l’origine une relation de travail, était devenu un ami au fil des ans, quand nos enfants s’étaient retrouvés dans les mêmes classes. En plus de s’occuper de sa famille nombreuse, Benoît avait une sœur aînée atteinte d’une maladie génétique. C’était peut-être pour ça qu’il avait été touché par l’histoire de Jeanne. En tout cas, il avait voulu s’investir auprès d’elle et de la communauté muco. Avec Solange, ils avaient intégré l’équipe des bénévoles de l’organisation de la Virade de Toulouse. Ils s’étaient lancés dans ce combat à nos côtés, non seulement avec leur soutien financier, mais surtout avec leur énergie, leur temps, leurs week-ends, dédiés à se battre contre une maladie qui ne les concernait même pas. J’avais mis du temps à comprendre leurs motivations. A l’AFLM, je n’avais longtemps côtoyé que des gens touchés directement par la maladie, parents, grands-parents, soignants. Solange m’avait simplement expliqué qu’un de leurs enfants aurait très bien pu se trouver dans le cas de Jeanne. Les règles de la génétique parlaient d’un cas sur quatre mille cinq cents dans la population générale, un sur quatre quand les deux parents étaient porteurs. Je trouvais leur engagement poignant. C’était un exemple vivant de l’amour de son prochain et de solidarité vraie.