Jamais à bout de souffle !

C'est sous une pluie battante que je suis sortie dimanche pour encourager mon homme lors de son premier semi-marathon ! Un comble pour un dimanche de printemps à Madrid, mais ça fait partie des aléas qu'on ne maîtrisera jamais.
Sur la ligne du départ, il y avait plus de 31.000 sportifs, qui allaient se défier sur 10, 21 ou 42 km. L'excitation était palpable et les "supporters" comme moi étaient nombreux. Je ne sais pas pourquoi je suis si émotive, mais c'est vrai que j'ai eu la larme à l’œil en voyant s'élancer les coureurs en fauteuil roulant. (Entendons-nous bien, ce sont des fauteuils équipés pour sportifs de haut niveau, mais quand même !) Je suis émue par ces personnes qui sont condamnées à ne plus pouvoir marcher et qui se mettent à "courir" un marathon !
Dans une course, la préparation et l'entraînement sont essentiels mais pas suffisants. Il faut que le mental suive. Il faut avoir envie de se dépasser pour franchir la ligne d'arrivée. Dans mon cas, je serais bien incapable de relever un tel défi. C’est vrai que j’ai participé, il y a plusieurs années, à quelques courses à pied ! La course-relais lors des Virades de l'Espoir, par exemple ! Ou encore la course du souffle à Seysses, même si ce n'était que 5 km. Et pourtant, ces courtes distances représentaient pour moi un challenge, heureusement sans que ce soit insurmontable ! Comme je ne suis pas très sportive, je dois trouver la façon de concilier mon souffle (qui a parfois du mal à sortir alors que je ne fais aucun effort physique !) et mes projets.
C'est là où un autre exploit sportif m'a marquée, le marathon de Paris de Paul Fontaine. Un muco trentenaire qui a établi le record du monde du marathon pour un muco (4h de course !). On pourrait croire que c'est de la folie pure et simple, de s'embarquer dans cette course, sur une distance aussi longue, avec les poumons d'un muco. Pourtant, Paul n'en est pas à son premier marathon, et c'est bien une revanche sur la muco qui l'anime. Quelle performance ! Mais à y regarder de plus près, chacun d'entre nous, dans la communauté muco, nous avons à notre actif des victoires sur la maladie, petites ou grandes, discrètes ou remarquées, et c'est ça qui fait la beauté de notre combat.
Parfois, il suffit de s'entendre dire "Mais c'est impossible !" pour avoir envie de défier le sort et de montrer qu'on a beau être malade, invalide, handicapé, on ne pourra jamais nous ôter notre volonté de fer. Volonté de se battre pour respirer, un combat de chaque instant qui ne se remarque pas vraiment dans la vie de tous les jours mais qui est pourtant bien présent. Volonté de se battre pour réaliser un projet qui nous tient à cœur, que ce soit un voyage, une création, un défi sportif, des études universitaires, une rencontre... Volonté de se battre pour ne pas susciter la pitié dans le regard des autres. Volonté de se battre pour mener une vie la plus "normale" possible, malgré les traitements quotidiens, les séances de kiné, les aérosols, les perfusions, les désagréments physiques... Volonté de se battre pour profiter le plus longtemps possible des êtres chers qui nous entourent.
Alors, tout comme je me suis retrouvée au bord de la route, à encourager les sportifs lors du marathon de Madrid, j’encourage tous les mucos et leur entourage à se fixer des objectifs et à relever leurs propres défis. La victoire est au bout du chemin !
Rayons de sourire,
Jessica

Mathieu - 24 septembre 1996
Jeanne nous distribua nos dossards pour le relais. On faisait partie de l’équipe « Jessie Jane ». Je notai le clin d’œil. Il n’y avait que moi qui l’appelais comme ça. Elle fit les présentations avec les autres coureurs qu’elle connaissait, en général des amis de ses parents, et son pneumologue, qu’elle adorait, le Docteur Sab. On s’aligna sur la ligne de départ. On allait d’abord faire un tour de chauffe pour repérer le parcours avec tous les participants. Ensuite commencerait la course-relais. Jessie Jane demanda qui voulait partir en premier, Karim se porta volontaire pour enchaîner les deux premiers tours. Puis on donna le top départ.
Jeanne était très concentrée sur sa foulée. Cédric me parlait en déconnant, comme à son habitude. On était restés soudés sur cette première boucle. Au bout de huit cents mètres, un panneau indiquait qu’on en était à la moitié. Je commençais à sentir que j’étais un peu rouillé, mais je n’allais pas le montrer, encore moins devant Jeanne. C’était quand même la honte qu’elle soit en meilleure forme que moi ! OK, je l’avais peut-être préparée un peu à la légère, cette course, mais je devais bien être capable de courir deux kilomètres sans être essoufflé ! Du moins, c’était ce que j’avais cru quand je m’étais engagé auprès de Jeanne. Sur le terrain, je commençais à changer d’avis... Allez, on arrivait presque à la fin de la boucle ! Alice nous y attendait pour nous encourager.

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