Aujourd’hui, l’Assemblée Nationale devait étudier en deuxième lecture une proposition de loi portant sur la fin de la prise en compte des revenus du conjoint dans le calcul de l’Allocation Adulte Handicapé (AAH).
L’AAH est une aide de l’Etat, versée sous condition de ressources, aux personnes handicapées de plus de 20 ans dans l’incapacité de subvenir à leurs besoins du fait de leur handicap. Au 1er avril 2021, l’AAH à taux plein est de 903,60€ par mois.
Le plafond à ne pas dépasser pour pouvoir bénéficier de cette allocation dépend de la situation conjugale et du nombre d’enfants à charge. Une personne seule sans enfant à charge ne touchera pas d’AAH si ses revenus annuels dépassent 10 843,20 € (les 20 centimes ont leur importance !). Une personne en couple (mariée ou en concubinage) sans enfant à charge ne touchera pas d’AAH si les revenus annuels du couple dépassent les 19 626,19 € (là encore, les 19 centimes font toute la différence !). Le plafond est majoré de 5 421,60 € par enfant à charge.
L’AAH ne pouvant se cumuler avec une pension d’invalidité ou tout autre type de revenus, son montant sera diminué du montant des autres revenus perçus (s’ils ne dépassent pas les 903,60 € net mensuel).
Ce qui est en jeu dans cette proposition de loi, c’est de déconjugaliser les revenus du conjoint dans le calcul du plafond de ressources. Cette proposition fait consensus parmi tous les groupes politiques, sauf pour la majorité.
Aujourd’hui, si vous êtes handicapé et que votre conjoint gagne plus de 1 020 € net par mois, le montant de votre AAH est revu à la baisse, jusqu’à être supprimé si les revenus dépassent 2 270 € net. Aujourd’hui les personnes handicapées en couple dépendent financièrement de leur conjoint. Il faut donc sacrément l’aimer, son conjoint handicapé qui ne peut pas participer aux revenus du foyer, pour continuer à l’entretenir ! (Sans compter le soutien moral et physique que l’on demande à notre conjoint.) Ou alors la personne handicapée doit renoncer à la vie de couple pour garder sa maigre autonomie. A croire que la vie est décidément trop facile pour tous ces profiteurs d’handicapés !
Ce texte avait été voté par l’Assemblée Nationale une première fois en février 2020, contre l’avis du gouvernement et de la majorité. En mars 2021, le Sénat l’avait ensuite validé. Mais les députés l’ont ensuite profondément transformé lors d’une nouvelle étude le 9 juin dernier. Plutôt que la déconjugalisation, le gouvernement propose de revoir le mode de calcul de la prise en compte des revenus du conjoint. Actuellement, le niveau de ressources est calculé après un abattement de 20%, ce que le gouvernement propose de remplacer par un abattement forfaitaire de 5 000 €.
Lors des débats de ce jour, cet article a suscité un véritable tollé au sein de l’Assemblée Nationale. Sophie Cluzel, la secrétaire d’Etat chargée des Personnes handicapées, a même avancé l’argument absolument incroyable que « l’informatique ne le permettait pas »… Quand on voit que les ressources prises en compte pour le calcul de l’AAH correspondent aux revenus de l’année N-2 (soit l’année 2019 pour les demandes effectuées en 2021), et qu’il faut encore remplir des papiers à renvoyer par courrier tous les 3 mois pour justifier de ses revenus, on se demande bien à quel système informatique elle faisait référence.
Finalement le gouvernement a demandé un vote bloqué sur cet article. Le principe est simple : au lieu d’examiner une loi article par article, avec les amendements liés, l’Assemblée doit se prononcer sur l’intégralité du texte, ne prenant en compte que les amendements proposés ou approuvés par le gouvernement. En signe de protestation, les élus de gauche et de droite ont quitté l’hémicycle, puis le texte a été voté uniquement par les élus de la majorité. La prochaine étape se déroulera au Sénat, en deuxième lecture, puisque le texte adopté par l’Assemblée Nationale est différent de celui voté par le Sénat en mars dernier.
Bravo pour cette leçon de démocratie digne d’une dictature ! Voilà comment est menée la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances » ! Les 12 millions de personnes handicapées en France sont complètement abasourdies ! C’est tout simplement scandaleux, je suis outrée !
Rayons de sourire,
Jessica
1 De Rou -
Il ne faut rien attendre de cette majorité pour qui l'humanisme est un mot totalement inconnu.