Il aura suffi d'une micro-seconde à peine pour que je tombe sous le charme
de mon fils. Je me suis sentie tellement fière de mes exploits de jeudi
dernier ! (vous comprenez maintenant pourquoi j'ai manqué à l'appel de la
publication du billet du jeudi...)
Depuis les cours de préparation à l'accouchement j'avais du mal à imaginer le
déroulement de cette épreuve ultime ! Je ne me voyais pas assez forte pour
tenir le rythme physique et en même temps je pensais bien que je pouvais me
surpasser pour un moment aussi intense. J'avais raison de faire confiance à cet
instinct animal qui a finalement plus que décuplé mes forces. (Je reconnais que
la cure IV de septembre a fortement contribué à me fournir toute l'énergie
nécessaire pour le jour J!)
Quelle satisfaction incroyable d'avoir pu donner le jour au plus beau petit
garçon du monde (of course!) à la force de mon souffle ! C'est une
réaction très égoïste mais il faut bien savoir être égoïste de temps en
temps.
D'autant plus que mon euphorie n'aura pas duré très longtemps car le contrecoup
du plus gros effort de ma vie ne s'est pas fait attendre. J'ai profité des
premiers instants avec mon fils sur la poitrine puis mon corps m'a complètement
lâchée et j'ai perdu connaissance. L'équipe médicale a bien sûr géré ça comme
des pros et j'ai recouvré mes esprits un peu plus tard.
C'est après mon deuxième malaise le lendemain que j'ai fait un bilan sanguin.
Comme j'étais fortement anémiée j'ai eu droit à une transfusion de deux culots
de sang neuf. Je suis donc sortie de la maternité avec des suppléments en fer
et une ordonnance pour contrôler le niveau de mes globules rouges !
Mais surtout je repars avec un nouveau statut dont je suis extrêmement
fière : celui de maman ! Et maintenant, je me concentre sur mes soins
pour pouvoir assurer un maximum ce rôle de nouvelle maman. Pas question de
laisser le Pyocianique jouer les trouble-fête !
Rayons de sourire,
Jessica
Patricia - 5 mai 1983
Les pieds coincés dans les étriers, je ruminais. Les contractions, bien qu’espacées pour le moment, étaient tellement douloureuses ! Consciencieusement, je labourais de mes ongles le bras de mon homme qui supportait la douleur, sans oser se plaindre. De toute façon, il savait bien que c’était bénin par rapport à ce que j’étais en train d’endurer. J’étais en salle de travail depuis plusieurs heures, qui me paraissaient une éternité. J’étais épuisée. Arrivée la veille au soir, j’avais vu le soleil se coucher, les étoiles se lever, et laisser de nouveau la place au soleil, qui était maintenant à son zénith. Malgré les encouragements de la sage-femme, j’en avais marre. Je ne comprenais pas ce qui retenait notre bébé aussi longtemps. J’alternais les cris, les soupirs, les larmes. Je respirais tant bien que mal, façon « petit chien ». Quand vint le moment de pousser, je m’appliquai de toutes mes forces, mais apparemment pas assez fort. Ça n’avait pas suffi. J’étais à bout.
Enfin, à 16 h 10, le cri tant attendu retentit. Avec grand soulagement, je desserrai les doigts et libérai ainsi le bras de Laurent. Mon mari m’embrassa sur le front. J’étais en nage mais il s’en fichait. La sage-femme posa alors sur ma poitrine une minuscule boule gluante toute chevelue qui braillait : notre fille chérie. Nos regards de parents étaient subjugués par cette forme minuscule et ridée, qui ressemblait alors plus à un crapaud velu qu’à une petite princesse. Comme nous avions déjà convenu du prénom pour le bébé, je passai mes doigts dans ses cheveux collants en souhaitant la bienvenue à Jeanne.