A la veille du Colloque Français des Jeunes Chercheurs 2022 (suivez le croisillon #CFJC2022 sur Twitter !), l’association Vaincre la Mucoviscidose a organisé une rencontre entre les patients / proches et les jeunes chercheurs.
Grâce à la visioconférence, nous avons été près de 70 personnes réunies pour l’événement, afin d’échanger autour de la recherche sur la mucoviscidose. Pour les jeunes chercheurs, qui sont souvent plus familiers avec le labo qu’avec des patients en chair et en os, c’est une belle occasion de communiquer sur leurs travaux de recherche avec les premiers concernés. Certes, il s’agit là de travaux de recherche fondamentale essentiellement, donc il reste encore du chemin à parcourir avant que les patients puissent en retirer un bénéfice tangible. Néanmoins, la diversité des projets présentés est très encourageante pour toute la communauté muco ! (Vous pouvez d’ailleurs voir la liste complète sur le programme du Colloque, disponible par ici.)
Après une courte introduction de Paola de Carli, la directrice du pôle Recherche de l’association, nous avons été répartis en 5 groupes, pour favoriser la discussion. Dans mon groupe, 5 jeunes chercheuses nous ont exposé leur projet de recherche, avec des mots plus accessibles que l’habituel jargon scientifique.
Clara s’intéresse aux patients en impasse de diagnostic et aux formes frontières de la maladie, dont on ne retrouve une mutation génétique que sur un seul allèle. Aux yeux des généticiens, les personnes ne présentant qu’une seule mutation ne devraient pas être malades, mais seulement porteurs sains. Néanmoins, Clara scrute les variants des éléments régulateurs qui se retrouvent à côté du gène CFTR, et qui pourraient expliquer une expression de la maladie.
Maëlys, après son Master en génétique, étudie le rôle des cellules immunitaires suppressives dans les infections au Pyocyanique. Le Pseudomonas attaque le système immunitaire du patient, et le corps n’arrive plus à se défendre naturellement. Les cellules immunitaires peuvent devenir suppressives, au lieu d’aider le corps à se défendre contre l’infection bactérienne. En comprenant pourquoi le Pseudomonas induit ce changement immunitaire, on pourrait le traiter et ainsi découvrir de nouvelles pistes thérapeutiques contre ces infections. Pour rappel, le Pseudomonas aeruginosa infecte 37% des patients muco en France, et 21% de façon chronique (j’en suis un bon exemple !).
Claire recherche un nouveau modèle d’étude pour le rôle de la protéine CFTR dans la maladie osseuse, en prélevant des échantillons de sang sur des patients muco et des donneurs sains, pour générer des cellules souches. Ces cellules souches sont ensuite différenciées en différentes cellules (d’os, de cartilage et de graisse). En analysant le retard de différenciation des cellules d’os par rapport aux autres cellules, on pourrait comprendre le mécanisme de maladie osseuse liée à la mucoviscidose (qui touche un tiers des patients adultes). C’est un long procédé, mais les perspectives sont très intéressantes, car on pourrait mettre en place un outil pour la recherche qui évite les prélèvements invasifs (une prise de sang étant plus facile à réaliser qu’une biopsie de l’os) et surtout qui permettrait une médecine personnalisée.
Hélène cherche à comprendre comment le Pseudomonas aeruginosa (toujours lui !) résiste au système de défense du patient dans le cas d’une infection chronique. Elle utilise le modèle du poisson-zèbre, qui est un petit vertébré transparent, sur lequel on peut suivre l’évolution des bactéries vertes de Pyocyanique, injectées directement dans le cerveau. Les macrophages (cellules qui sont censées manger les bactéries), cellules de défense contre l’infection, ont été marquées en rouge pour être mieux repérées. Ce nouveau modèle animal pourrait également tester des thérapies innovantes alternatives aux antibiotiques pour combattre les infections chroniques au Pseudomonas.
Enfin, Marine travaille sur un moyen de contourner les mécanismes de résistance aux antibiotiques, problème bien connu des « vieux » patients sur qui les antibiotiques ne font plus d’effet. Mais j’ai découvert que la plupart des antibiotiques mis sur le marché depuis les années 30 étaient systématiquement confrontés à des mécanismes de résistance, et ce de façon plutôt rapide. Ces mécanismes peuvent s’exprimer de plusieurs manières : 1- la diminution de la perméabilité membranaire, ce qui fait que l’antibiotique ne peut plus pénétrer dans la cellule, 2- la modification de la cible, ce qui fait que l’antibiotique ne reconnait pas la bactérie, 3- l’inactivation enzymatique, 4- les pompes d’efflux, qui rejettent l’antibiotique à l’extérieur de la cellule. Pour contourner ces mécanismes, Marine étudie des molécules adjuvantes, qui n’ont pas d’effet en travaillant de façon isolée, mais qui peuvent potentialiser l’antibiotique auquel elles sont associées. La stratégie est de trouver une molécule adjuvante qui pourrait faciliter l’entrée de l’antibiotique sur la bactérie (à gram-négatif, comme le Pseudomonas) et en bloquer la sortie. Sur les 160 molécules à cribler, 8 molécules sont pour l’instant retenues comme candidates. Le processus est encore long, mais néanmoins encourageant !
A la suite de ces différents exposés, les patients ont pu préciser leurs attentes vis-à-vis de la recherche, et les échanges étaient riches.
La rencontre s’est terminée par une présentation d’un projet très intéressant entre un chercheur et un patient co-chercheur, qui montre bien l’intérêt de travailler main dans la main.
Le mardi 15 février s’est déroulé le colloque, et je remercie ces jeunes chercheurs pour leur implication à nos côtés. Le combat continue, et nous allons le gagner !
Rayons de sourire,
Jessica