Diabète et Sandalettes

Je me rends souvent à reculons à mes rendez-vous avec la diabétologue qui me suit dans le cadre de mon diabète de mucoviscidose. Ces visites de contrôle ne sont pas très fréquentes, néanmoins elles me provoquent souvent des angoisses. Autant j'ai l'impression d'être plutôt à l'écoute de mon corps en ce qui concerne l'atteinte pulmonaire de la maladie car j'arrive à interpréter les signes de surinfection, autant je n'ai aucune prise sur mon diabète. (J'étais tombée des nues lorsque le test avec FreeStyle Pro avait enregistré que j'étais en hypoglycémie 26% du temps, comme je vous l'avais expliqué dans ce billet.)
C'est peut-être un déni de cette maladie supplémentaire, survenue à l'âge adulte pour chambouler encore toute ma prise en charge de la mucoviscidose, ou alors c'est parce que je ne suis pas très assidue à mes tests d'auto-contrôle, ou encore c'est dû au fait que le diabète de mucoviscidose n'a toujours pas de nom, ce qui fait qu'on me demande toujours si je suis diabétique de type I ou de type II, alors que je fais partie d'une autre catégorie de patients. Et puis, ce traitement par piqûres, c'est plutôt douloureux (même si le récent changement pour des aiguilles de longueur 4 mm a grandement contribué à un plus grand confort) et pas vraiment pratique (vu que je dois me poser la question à chaque repas des quantités de glucides pour adapter ma dose d'insuline, et que je n'ai pas très envie de me piquer deux fois en 20 minutes si jamais je change d'avis lorsque je vois arriver le dessert sur la table). Heureusement que je ne suis pas une grande accro au sucre !



Il n'empêche que cette fois-ci, mon moral était au beau fixe à l'heure de me rendre à mon rendez-vous, malgré les problèmes sur la ligne du RER, malgré l'attitude peu aimable de l'agent de sécurité qui m'a aboyé dessus pour vérifier mon pass sanitaire, malgré le fait que je doive rester debout au guichet administratif pour m'enregistrer (avec l'hygiaphone placé au niveau du nombril), malgré le fait que l'agent d'accueil dans le secteur des consultations ne soit pas disponible avant cinq bonnes minutes durant lesquelles une patiente voulait me doubler (pour arriver plus vite devant le médecin ?)...
C'est que je me sens tout simplement invincible depuis que j'ai commencé mon traitement de Kaftrio (si vous avez manqué cette information capitale, c'est par ici !) et je n'ai plus peur de ce que la diabétologue va me dire ! Dans les études cliniques, on doit avoir du mal à mesurer l'impact psychologique de ce nouveau médicament, alors que les chiffres de VEMS sont beaucoup plus faciles à mesurer et à comparer.
La médecin m'a dit qu'elle voyait de plus en plus de patients mucos sous Kaftrio, et que certains avaient pu réduire leurs doses d'insuline grâce à la trithérapie. Elle m'a mise en garde car chaque patient est unique, bien sûr, et dans une approche empirique, on ne peut pas faire de généralités. Selon elle, les patients qui sont diabétiques depuis longtemps et qui ont de forts besoins en insuline ne devraient pas voir beaucoup de changement sur leur traitement diabétique, car les cellules du pancréas ne vont pas miraculeusement repousser sous l'effet du Kaftrio. Par contre, pour les patients plus jeunes et avec de faibles besoins en insuline (comme moi, donc !), on peut espérer en retirer un bénéfice secondaire à moyen terme. (Elle ne pouvait pas me faire plus plaisir !)
Une étude clinique est d'ailleurs en cours dans plusieurs CRCM pour évaluer l'effet de la trithérapie sur l'atteinte diabétique des patients présentant une intolérance au glucose ou un diabète de la mucoviscidose. A priori, l'étude se termine en février 2022, à la suite de quoi nous pourrons en étudier les résultats. En attendant, l'étude "de vraie vie" peut également contribuer à noter tous ces changements qui s'opèrent dans la prise en charge de cette maladie invisible et sournoise.
La médecin a également surveillé mes pieds, et surtout mes chevilles (qui sont bien évidemment sensibles à tous les compliments reçus ces dernières semaines), et elle m'a demandé de faire bien attention, et plus particulièrement en cette période estivale, à ne pas enserrer mon pied dans des sandales à bride qui compriment la circulation. Si les sandales provoquent une marque sur la peau une fois enlevées, c'est qu'elles sont trop serrées, ce qui peut se révéler dangereux pour des patients diabétiques.
Je suis repartie de ce rendez-vous avec un sentiment de légèreté très appréciable ! Je continue à être sur mon petit nuage grâce à la trithérapie !

Rayons de sourire,
Jessica

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